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Un livre sur un destin difficile : "Dans le sang de Laura Gomara"

https://www.pinterest.ru/pin/311241024233145062/
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Quand on a fait un très bon livre (surtout dans un genre aussi difficile, stéréotypé et apparemment avec des règles aussi marquées qu'en noir, même si on peut les sauter ou donner des approches nouvelles et originales), qu'on a été très bien accueilli par la critique et par le public lecteur, qu'on veut continuer à écrire dans le même genre (ou même dans un autre) est inévitable pour sentir une pression et une peur de ne savoir comment maintenir son niveau.

Si dans le premier roman de La Gomara, vous avez respiré, comme je l'ai déjà dit, une peur réaliste de la pauvreté, lorsque nous nous voyons expulsés, dans la rue, mendiant l'aumône, nous avons ici un autre type de pauvreté. Ne pas tout perdre, mais en perdre assez, le peu que nous avons, pour réaliser notre rêve d'une vie meilleure, pour démarrer une entreprise ou pour améliorer notre situation d'une façon ou d'une autre ; perdre assez pour déstabiliser toute une vie que nous pensions bien gérée malgré une base faible.

Eva est une voleuse. Une pickpocket qui vole dans le métro, dans la rue ou dans des appartements touristiques où elle sait qu'elle peut avoir une part.

"Je ne le fais dans les transports publics qu'en cas de besoin ou si je ne peux contenir l'impulsion, comme ce matin. Et quand je le fais, je préfère le vendredi et le samedi après-midi, avec les trains débordant de petits groupes qui ont fait du shopping. Même au petit matin du matin, quand les années 50 s'approchent de moi et me donnent presque le portefeuille qui sort de la poche arrière de mon pantalon".

Dans Côme Bâle Gien le protagoniste, une femme anti-fatale, a commencé à sombrer dans la misère et par un coup du sort à la fin de l'histoire a vu sa vie sinon arrangée, dans une meilleure situation qu'au début. Dans le sang, c'est tout le contraire. La situation plus ou moins allégée de la protagoniste se gâte lorsque le bijoutier qu'elle va habituellement lui faire chanter pour qu'elle fasse un travail pour lui. De plus, en raison des circonstances de l'affaire, Eva est obligée de retourner vivre dans la maison de ses parents et retournera même chez un ancien petit ami/amour/partenaire, Oleg, qui n'est pas exactement du blé propre non plus.

Cependant, contrairement à Ruth Santana, Eva est une femme mortelle. Elle n'est pas du genre, et c'est un atout en faveur de l'auteur, mais elle est maître de ses décisions, de ses succès et de ses erreurs, que l'on voit bouger, se mouiller, travailler, se tacher les mains. Et c'est aussi la voix qui nous racontera l'histoire ou les histoires d'elle et d'Oleg.

Gomara raconte de façon naturelle et réaliste le retour à la maison et les problèmes de la coexistence d'Eva avec ses parents, soulignant les conflits qui surgissent et qui semblent se reproduire avec une mère qui la traite encore comme si elle était une enfant et que notre protagoniste accuse d'avoir volé son enfance.

Allons-y pour quelques jours, dit-il.
-Où ça, où ça ?
-Très loin d'ici.
-Juste quelques jours ?
-Non, pour toujours.
-Vous êtes sérieux ?
-Non. Non.

Ce sont des moments où l'amitié est régie par des messages dans les groupes Whatsapp, des poses et des photos dans Instagram et d'autres mentions dans les réseaux sociaux, où les gens continuent de s'inquiéter de paraître en bonne santé, où les classes sociales continuent de se battre sans le savoir et où chacun doit sortir les marrons du feu, surtout si on doit vivre avec une maladie mortelle.

Et à tout cela s'ajoute le complot mafieux d'Oleg....

Le sang est lu avec enthousiasme, les personnages sont si bien profilés qu'on peut les imaginer parfaitement, on comprend leurs dilemmes, leurs problèmes et, surtout, on ne sait pas si on les aime ou pas. Parce qu'au final, le couple protagoniste est un couple de salauds que vous préférez ne pas avoir à croiser dans leur vie "professionnelle", mais que vous mettez sur leur peau, et l'auteur sait comment vous faire les habiller, et être capable de les comprendre. Cela a beaucoup de mérite et, pour couronner le tout, l'histoire est bien planifiée du début à la fin, mieux racontée et finalisée.

Il faut être très bon et avoir beaucoup de classe pour savoir bien mélanger tout cela et ne pas avoir un cocktail trop arrosé ou trop fort et Gomara a montré qu'il savait choisir les ingrédients et les quantités pour que le résultat soit parfait.

Il est à noter que Gomara a sucé le noir puisqu'il a l'usage de la raison et ce second roman est la preuve que le précédent n'était pas le résultat de la chance du débutant. Mais, surtout, on remarque qu'il se déballe avec aisance et qu'il est impatient de régurgiter ses bagages en libérant sur le papier tout ce que sa tête veut mettre au monde.

En la sangre n'est pas un roman noir comme les autres. C'est le roman noir qui vient de définir le style et la voix d'un auteur qui promet de nous donner beaucoup plus de joies littéraires. Un roman original, frais, décontracté mais en même temps respectueux des classiques. Une ancienne pute. L'œuvre d'un auteur pour qui, si le monde était juste, les éditeurs devraient offrir des contrats à l'aveugle pour un troisième livre.